Des communes s’engagent pour sauver leur patrimoine. Quatre exemples inspirants
La Municipalité d’Echallens a en main tous les outils juridiques nécessaires pour s’opposer au projet de construction mis à l’enquête au chemin de la Pépinière. Elle avait d’ailleurs déjà refusé le projet proposé il y a deux ans au même endroit, trop imposant pour la zone, et n’avait pas hésité à demander au Canton le recensement architectural de la maison et du parc. Une bonne initiative puisque tous deux avaient obtenu une note 3 qui interdit leur destruction. Les communes sont de plus en plus nombreuses à protéger leur patrimoine bâti et naturel. Souvent avec le soutien des tribunaux, notamment celui du Tribunal fédéral.
1- Une ferme sauvée par la Municipalité de Cugy
Il y a les communes qui, par exemple, rachètent elles-mêmes des biens anciens pour en faire des biens d’utilité publique plutôt que de les laisser se transformer en projets purement spéculatifs. C’est le cas de la commune de Cugy qui, il y deux ans, s’est battue contre la commission foncière rurale pour acquérir une ferme située au centre du village dans le but d’y installer une garderie et une unité d’accueil pour écoliers. «Nous avons tenu à garder l’esprit de cette ferme chère à un certain nombre de Cugiérans», expliquait alors la Municipale en charge des bâtiments dans les colonnes de l’Echo du Gros-de-Vaud.
2- Villars-Epeney au Tribunal fédéral pour protéger son paysage
D’autres communes sont prêtes à affronter les propriétaires devant les tribunaux pour protéger l’esthétique d’un lieu. Ainsi, en 2015, la commune de Villars-Epeney, qui s’était opposée à l’édification d’un abri-tunnel agricole à proximité d’un lotissement, n’a pas hésité à aller jusqu’au Tribunal fédéral pour empêcher cette construction. Elle a gagné! En effet, l’inventaire des sites construits à préserver en Suisse (ISOS) identifie Villars-Epeney comme un village d’intérêt régional (comme Echallens!) Le Tribunal fédéral a dès lors estimé qu’en vertu de l’article 86 de la Loi vaudoise sur l’aménagement du territoire et les constructions, un projet de construction peut être interdit s’il ne s’intègre pas à l’environnement ou s’il compromet le caractère d’un quartier, et cela même s’il répond à toutes les autres dispositions en matière de police des constructions. Un exemple intéressant dans le cas du projet actuellement mis à l’enquête à Echallens au chemin de la Pépinière puisque cet arrêt du TF, qui précise que «les règlements communaux doivent contenir des dispositions en vue d’éviter l’enlaidissement des localités et de leurs abords», fait désormais jurisprudence.
3- Les élus lausannois défenseurs du patrimoine
C’est toutefois à la ville de Lausanne que revient la palme de la lutte pour la préservation du patrimoine. Depuis quelques années, celle-ci n’hésite plus à refuser le permis de construire de projets qui s’intègrent mal dans le paysage architectural d’un quartier, à plus forte raison lorsque celui-ci est inventorié par l’ISOS ou lorsque les bâtiments concernés sont recensés par le Canton. Ces décisions font l’objet de recours de la part des propriétaires et ont amené à plusieurs reprises la Municipalité jusqu’au Tribunal fédéral qui, généralement, tranche en sa faveur.
En 2017, les juges fédéraux ont ainsi sauvé la Villa Orange de l’avenue Saint-Paul, une bâtisse centenaire dotée d’une note 4 au Recensement architectural, qui devait être démolie pour faire place à un bloc locatif (la note de 3 dont bénéficient la bâtisse et le parc challensois du chemin de la Pépinière impose une protection encore supérieure). Le Tribunal fédéral a également permis d’éviter un immeuble de vingt logements qui devait remplacer deux bâtiments aux Fontenailles, au sud de Lausanne.
Dans bien des cas, ce sont les élus lausannois, et même le Conseil communal, qui se font le relais des riverains opposés à ces projets et qui mettent la pression sur les autorités pour que la densification se fasse en respectant l’harmonie architecturale des quartiers. En 2015, le parti socialiste s’est même engagé en envoyant à la Municipalité un postulat lui demandant de déterminer des périmètres à protéger et de fixer pour ceux-ci des objectifs clairs de protection.
4- Les jardins et les arbres font aussi partie du patrimoine
L’année dernière encore, les autorités lausannoises ont sauvé deux sites, notamment en raison de leurs jardins et de leur arborisation. Elles ont en effet refusé le permis de construire d’un projet immobilier qui menaçait une villa du 19e siècle à l’Avenue d’Ouchy, au motif que celui-ci occupait la quasi-totalité de la parcelle, faisant disparaître son jardin et son arborisation (24 heures du 13.08.2020). Quelques mois auparavant, le Tribunal cantonal avait déjà donné raison à la Municipalité dans le cas d’un projet prévu au boulevard de Grancy (24 heures du 28.01.2020). Celui-ci impliquait de démolir un bâtiment des années 50 pour en construire un autre, de réduire ses jardins et d’abattre six arbres. Ce qui a fait pencher la balance? L’ISOS, d’une part, qui inventorie le secteur avec un «objectif de protection maximale» (comme le secteur dont fait partie la parcelle 335 du chemin de la pépinière à Echallens) Les jardins, d’autre part, qui, selon les juges, «participent à la cohérence du lieu» (là encore, comme au chemin de la Pépinière). Un élément que le Tribunal cantonal a rappelé aux propriétaires, qui s’estimaient, en cas de non-octroi du permis, dans l’impossibilité de développer un quelconque projet. «Cette décision n’empêche pas la réalisation d’une construction mieux intégrée au contexte et à l’environnement bâti […] quand bien même cela pourrait impliquer une réduction de l’utilisation des droits à bâtir.»
- Corinne Bloch -
Vous êtes opposé à la destruction du patrimoine challensois et au projet de construction mis à l’enquête au chemin de la Pépinière? Cliquez ici:
Posted: 13 juin 2021 by ASE
Des communes s’engagent pour sauver leur patrimoine. Quatre exemples inspirants
La Municipalité d’Echallens a en main tous les outils juridiques nécessaires pour s’opposer au projet de construction mis à l’enquête au chemin de la Pépinière. Elle avait d’ailleurs déjà refusé le projet proposé il y a deux ans au même endroit, trop imposant pour la zone, et n’avait pas hésité à demander au Canton le recensement architectural de la maison et du parc. Une bonne initiative puisque tous deux avaient obtenu une note 3 qui interdit leur destruction. Les communes sont de plus en plus nombreuses à protéger leur patrimoine bâti et naturel. Souvent avec le soutien des tribunaux, notamment celui du Tribunal fédéral.
1- Une ferme sauvée par la Municipalité de Cugy
Il y a les communes qui, par exemple, rachètent elles-mêmes des biens anciens pour en faire des biens d’utilité publique plutôt que de les laisser se transformer en projets purement spéculatifs. C’est le cas de la commune de Cugy qui, il y deux ans, s’est battue contre la commission foncière rurale pour acquérir une ferme située au centre du village dans le but d’y installer une garderie et une unité d’accueil pour écoliers. «Nous avons tenu à garder l’esprit de cette ferme chère à un certain nombre de Cugiérans», expliquait alors la Municipale en charge des bâtiments dans les colonnes de l’Echo du Gros-de-Vaud.
2- Villars-Epeney au Tribunal fédéral pour protéger son paysage
D’autres communes sont prêtes à affronter les propriétaires devant les tribunaux pour protéger l’esthétique d’un lieu. Ainsi, en 2015, la commune de Villars-Epeney, qui s’était opposée à l’édification d’un abri-tunnel agricole à proximité d’un lotissement, n’a pas hésité à aller jusqu’au Tribunal fédéral pour empêcher cette construction. Elle a gagné! En effet, l’inventaire des sites construits à préserver en Suisse (ISOS) identifie Villars-Epeney comme un village d’intérêt régional (comme Echallens!) Le Tribunal fédéral a dès lors estimé qu’en vertu de l’article 86 de la Loi vaudoise sur l’aménagement du territoire et les constructions, un projet de construction peut être interdit s’il ne s’intègre pas à l’environnement ou s’il compromet le caractère d’un quartier, et cela même s’il répond à toutes les autres dispositions en matière de police des constructions. Un exemple intéressant dans le cas du projet actuellement mis à l’enquête à Echallens au chemin de la Pépinière puisque cet arrêt du TF, qui précise que «les règlements communaux doivent contenir des dispositions en vue d’éviter l’enlaidissement des localités et de leurs abords», fait désormais jurisprudence.
3- Les élus lausannois défenseurs du patrimoine
C’est toutefois à la ville de Lausanne que revient la palme de la lutte pour la préservation du patrimoine. Depuis quelques années, celle-ci n’hésite plus à refuser le permis de construire de projets qui s’intègrent mal dans le paysage architectural d’un quartier, à plus forte raison lorsque celui-ci est inventorié par l’ISOS ou lorsque les bâtiments concernés sont recensés par le Canton. Ces décisions font l’objet de recours de la part des propriétaires et ont amené à plusieurs reprises la Municipalité jusqu’au Tribunal fédéral qui, généralement, tranche en sa faveur.
En 2017, les juges fédéraux ont ainsi sauvé la Villa Orange de l’avenue Saint-Paul, une bâtisse centenaire dotée d’une note 4 au Recensement architectural, qui devait être démolie pour faire place à un bloc locatif (la note de 3 dont bénéficient la bâtisse et le parc challensois du chemin de la Pépinière impose une protection encore supérieure). Le Tribunal fédéral a également permis d’éviter un immeuble de vingt logements qui devait remplacer deux bâtiments aux Fontenailles, au sud de Lausanne.
Dans bien des cas, ce sont les élus lausannois, et même le Conseil communal, qui se font le relais des riverains opposés à ces projets et qui mettent la pression sur les autorités pour que la densification se fasse en respectant l’harmonie architecturale des quartiers. En 2015, le parti socialiste s’est même engagé en envoyant à la Municipalité un postulat lui demandant de déterminer des périmètres à protéger et de fixer pour ceux-ci des objectifs clairs de protection.
4- Les jardins et les arbres font aussi partie du patrimoine
L’année dernière encore, les autorités lausannoises ont sauvé deux sites, notamment en raison de leurs jardins et de leur arborisation. Elles ont en effet refusé le permis de construire d’un projet immobilier qui menaçait une villa du 19e siècle à l’Avenue d’Ouchy, au motif que celui-ci occupait la quasi-totalité de la parcelle, faisant disparaître son jardin et son arborisation (24 heures du 13.08.2020). Quelques mois auparavant, le Tribunal cantonal avait déjà donné raison à la Municipalité dans le cas d’un projet prévu au boulevard de Grancy (24 heures du 28.01.2020). Celui-ci impliquait de démolir un bâtiment des années 50 pour en construire un autre, de réduire ses jardins et d’abattre six arbres. Ce qui a fait pencher la balance? L’ISOS, d’une part, qui inventorie le secteur avec un «objectif de protection maximale» (comme le secteur dont fait partie la parcelle 335 du chemin de la pépinière à Echallens) Les jardins, d’autre part, qui, selon les juges, «participent à la cohérence du lieu» (là encore, comme au chemin de la Pépinière). Un élément que le Tribunal cantonal a rappelé aux propriétaires, qui s’estimaient, en cas de non-octroi du permis, dans l’impossibilité de développer un quelconque projet. «Cette décision n’empêche pas la réalisation d’une construction mieux intégrée au contexte et à l’environnement bâti […] quand bien même cela pourrait impliquer une réduction de l’utilisation des droits à bâtir.»
- Corinne Bloch -
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