Echallens met en scène ce qu’elle n’est plus

Du 15 au 26 août, Echal­lens a célébré la Fête du Blé et du Pain. L’am­biance y a été chaleureuse, con­viviale, et le spec­ta­cle enchanteur. Il n’empêche qu’en­tre l’im­age don­né par la fête et la réal­ité, il y avait quelques dif­férences majeures que Patrick Mori­er-Genoud a relevées dans un arti­cle paru sur le site Bon pour la tête.  

Pour la Fête du Blé et du Pain, le chef-lieu du Gros-de-Vaud se déguise en paysanne, mais ne fait pas vraiment illusion.

Echal­lens est une petite ville plutôt moche, ayant renon­cé à son cachet, à son ances­trale cul­ture paysanne, à son car­ac­tère. Au fil des ans, le chef-lieu du Gros-de-Vaud s’est trans­for­mé en ban­lieue lau­san­noise, fier d’accueillir de plus en plus d’habitants et de plus en plus de voitures. Il s’y con­stru­it de grands immeubles et chaque par­celle est rentabil­isée par d’habiles promoteurs.

Jusqu’au 26 août, Echal­lens tente de don­ner un autre spec­ta­cle d’elle-même. La Fête du blé et du pain est une tra­di­tion qui voit, tous les dix ans, les habi­tants de la région – et au-delà – se sou­venir d’un passé pas si loin­tain où l’on y était en pleine cam­pagne, au milieu des champs de blé, et où la vie était ryth­mée par les travaux agri­coles et non pas par les bou­chons routiers qui blo­quent la cir­cu­la­tion aux heures de pointe.

Pour l’occasion, la ville s’est déguisée en paysanne, à grand coup de bottes de paille, d’épis de blé et de copeaux de bois.

L’édition 2018 de la grande fête chal­len­soise, la qua­trième, a pour point d’orgue le spec­ta­cle «Sol­stices». Joué tous les soirs en plein air devant des mil­liers de spec­ta­teurs, il met en scène près de 400 fig­u­rants, 200 chanteurs, 60 musi­ciens et quelques comédiens.

Le pain ou l’or?

Que racon­te «Sol­stices»? Dans un moyenâgeux passé, les habi­tants d’Echallens ont faim. Telle­ment faim qu’ils man­gent leurs mulets – c’est de là que leur viendrait leur sobri­quet offi­ciel de Rondze-Mulets, de rongeurs de mulets. Ils subis­sent la tyran­nie d’un méchant seigneur, sont dés­espérés. Trois courageux per­son­nages – deux femmes et un homme – par­tent à la recherche d’un tré­sor qui va résoudre tous les problèmes.

Leur quête sera pleine de péripéties et de ren­con­tres inso­lites. A la fin, ils doivent choisir entre des cof­fres rem­plis d’or ou la recette du pain. Ils choi­sis­sent bien évide­ment le pain, délais­sent l’or et revi­en­nent chez eux en héros. Tout le monde chante, danse, se réjouit, c’est mer­veilleux. Et les spec­ta­teurs se lèvent pour applaudir cette ode aux valeurs «naturelles», ce mag­nifique renon­ce­ment à la triv­i­al­ité de l’or.

Mon voisin de rangée, qui a bien com­pris de quoi il s’agit, mur­mur­era, un peu décon­fit: «Mais, c’est une his­toire gauchiste…»

Ce qui est cer­tain, c’est que cette his­toire est l’exact con­traire de celle que vivent les Chal­len­sois. En 2018, c’est l’argent des pro­mo­teurs qui a été choisi et priv­ilégié, et le pain, la majorité des gens en a per­du la recette et l’achète au super­marché, sous sa forme industrielle.

A Echal­lens, le mot «blé» doit aujour­d’hui être com­pris dans son accep­tion argo­tique, pas comme une céréale.

Voilà une idée pour les futurs con­cep­teurs de la fête, dans dix ans.

Patrick Mori­er-Genoud, Bon pour la tête

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